Se libérer du jugement des autres peut être un énorme défi. La peur du jugement est souvent inexplicable, et rationnellement parlant, cette peur est incompréhensible. Pourquoi avoir peur de prendre la parole en public par exemple? Du point vu de la raison notre vie ne court aucun danger du fait de parler en public, pourtant la plupart d’entre nous ressentent la peur de cet exercice. Bien sûr que cela dépend du niveau d’intimité , de familiarité et du niveau hiérarchique que nous avons avec ceux qui nous regardent et écoutent. Prendre la parole devant ses supérieurs professionnels n’est pas la même chose que de parler devant ses collègues ou les membres de sa famille. Pour certains, la peur du jugement peut être celle de prendre la parole en public ; pour d’autres, cela peut être une peur plus physique. Dans mon club, de jiu-jitsu certains ne performent pas aussi bien en tournois qu’à l’entrainement, à l’entrainement ils battent tout le monde, en tournois ils perdent leurs moyens. Du fait de la pression de la foule et de leur proche qui leur regardent. Tout le monde ne réagit pas de la même manière sous la pression du regard des autres.
D’où vient cette peur et comment peut-on s’en libérer ?
Dans la peur du jugement, il y a l’idée de l’autre. Cette peur s’accompagne toujours avec l’idée d’être au centre de attention et l’idée de performance. En réalité, on a peur d’absorber l’attention des autres. L’attention est comme une lumière. Elle se reflète sur nous et fait passer inaperçu tout le reste autour de nous, pour nous et pour ceux qui nous la donnent. Donner son attention est une donation de soi. On peut voir l’attention comme la monnaie universelle, car l’attention est de l’intention. L’intention est le pouvoir de la foi, comme a été traitée longuement dans l’épisode pilule bleue ou pilule rouge partie III.
Recevant l’attention des autres, nous nous exigeons de la performance. Nous ne voulons pas subir les moqueries ni être diffamés. Ce qui peut s’expliquer par les besoins fondamentaux de la pyramide de Maslow. Maslow a élaboré une théorie sur les besoins fondamentaux humains et les a hiérarchisés du plus fondamental au plus sophistiqué.
La pyramide des besoins de Maslow
Il y a en tout cinq besoins, et il est énoncé que pour satisfaire un besoin il faut au préalable avoir satisfait le besoin antécédent.
- Le premier besoin est le physique, qui renvoie aux besoins primaires de se nourrir, de dormir et de se vêtir.
- Le deuxième besoin est celui de la sécurité. Il renvoie au besoin d’avoir le sentiment d’être protégé et d’avoir un logement.
- Le troisième besoin est celui de l’appartenance : la nécessité d’avoir une famille, des amis et d’être accepté dans le groupe social dans lequel on appartient.
- Le quatrième besoin est celui de l’estime : aspiration à se faire bien voir, aspiration au statut social et à l’expression de son unicité personnelle. Volonté de se distinguer, de se mettre en lumière par rapport à la moyenne. Forte volonté d’ascension sociale.
- Le cinquième besoin est celui de l’accomplissement : besoin d’épanouissement et de paix d’esprit. Le temps s’arrête, seul le moment présent existe. La performance n’est plus une inquiétude. L’élévation sociale n’est plus un challenge, cela devient secondaire. Ce qui compte à ce stade est la paix intérieure, la tranquillité et la rencontre avec soi.
Dans notre thématique du jour, à savoir la libération du regard des autres, la libération de leur jugement, je pense que cela relève du troisième niveau de la pyramide de Maslow. Nous avons peur du jugement des autres, car nous ne voulons pas être exclus du groupe. Nous ne voulons pas être reniés et nous retrouver isolés. Nous avons des schémas mentaux inconscients dès la naissance, codifiée dans le code génétique humain. Une d’elles est la peur du rejet. Cette peur est en profondeur et se cache derrière des peurs plus à la surface de la conscience. La peur du rejet se dissimule derrière des peurs objectives et compréhensibles. Comme celle de la performance, nous nous imposons un résultat par peur d’être rejetés. Parfois, nous sommes vraiment rejetés par manque de performance. Dans une société capitaliste, il faut bien délivrer des résultats. C’est une société concurrentielle organisée hiérarchiquement, c’est normal de se mettre la pression de la performance autrement , nous sommes exclus du groupe.
Il est normal de vouloir faire une bonne performance. Le problème, c’est que la peur du jugement n’aide pas à la créativité ni au calme qui permettent de délivrer une bonne prestation, peu importe le domaine. Il est nécessaire de se calmer, de se détendre et d’être dans le présent.
Se libérer de son propre jugement
Pour se libérer du jugement des autres, il faut d’abord se libérer de son propre jugement. Nous avons peur de la réjection, car nous avons peur de l’isolement et de la solitude. La peur d’être exclu du groupe a engendré la peur du jugement du groupe, qui à son tour a engendré le jugement personnel. Il faut détruire le juge intérieur personnel et ne plus se juger soi-même pour se libérer de la pression du groupe dans lequel nous évoluons. (Un épisode plus en profondeur sur le juge personnel)
Le jugement d’autrui est important seulement si nous le considérons comme important. Ce qui nous blesse n’est pas réellement ce que l’on pense de nous, mais ce que nous pensons de ce que les autres pensent de nous. C’est notre propre jugement du jugement des autres sur nous qui les rend notables et sensibles.
Si ce que dit quelqu’un sur nous nous blesse, c’est qu’inconsciemment nous admettons que c’est vrai. Nous admettons que la critique est véridique et exacte. Cela vient du fait que nous n’acceptons pas une partie de nous-mêmes. Pour se libérer de la sensibilité des jugements des autres, il faut s’accepter inconditionnellement. Nous devons accepter toutes les parties de notre personne, notre histoire personnelle et toutes nos expériences. Accepter son histoire personnelle ne veut pas dire , nier ses erreurs. Cela ne veut pas dire non plus que nous avons pas besoin de changer ni que tout est parfait comme c’est.
S’accepter s’est constaté ce qui est, sans jugement. S’accepter est le fait de ne pas renier quoi que ce soit de notre histoire et de l’expérience que nous avons vécues. S’accepter est ne pas se juger. On pourrait penser qu’il faille se juger soi-même, autrement nous ne pourrions pas corriger ses fautes, ses erreurs et sa mauvaise conduite. Le jugement est une condamnation et tant qu’on se juge soi-même on ne se libère pas de ce dont on se juge. Il faut plutôt choisir ce dont nous voulons vivre et s’écarter de ce que nous ne voulons pas vivre. Car chaque action est une affirmation de celui que nous sommes. Pour choisir, il n’y a pas besoin de jugement, nous reconnaissons facilement ce qui est positif pour nous et ce qui est au contraire négatif. Pourquoi devrions-nous continuer de répéter une action qui nous fait du mal ? Le plus grand rappel à soi c’est l’action, l’action est la meilleure expression de son intention. Il n’est pas nécessaire de juger son soi ; il suffit de choisir nos actions.
La seule question à se poser est la suivante : est-ce que telle action définit qui je suis ?
Une fois que nous nous acceptons, nous nous libérons de notre propre jugement et en nous libérant de notre propre jugement nous arrêtons de valoriser le jugement des autres. Si quelqu’un nous accuse d’être gros, laid ou pas assez bon et que nous éclatons de rire tout à coup c’est lui qui se sent insulté. Car cette personne comprendrait que son avis n’a pas d’importance pour nous. Il n’y a pas de pire réponse à celui qui juge que le mépris, à condition que le mépris soit sincère.
Le jugement est un cadeau
Malgré tout, je dirai que le jugement est un cadeau, car ils permettent de nous réaliser ce qui peut être amélioré en nous. Les jugements sont négatifs s’ils déclenchent le jugement de soi. Mais si nous nous acceptons inconditionnellement au point de ne plus nous juger nous-mêmes alors les jugements et critiques des autres sur nous peuvent être une bonne chose. Comme je l’ai déjà mentionné, ce que j’entends par « s’accepter inconditionnellement » n’implique pas le refus de considérer ses défauts et faiblesses. Pour moi, accepter signifie reconnaître ce qui est sans aucune honte et sans chercher à le cacher du regard des autres. Une fois que nous nous acceptons sans honte, nous pouvons travailler sur ce que nous constatons qui peut être amélioré. Accepter n’est pas renoncer à quelque chose ; c’est constater ce qui est sans honte ni jugement. La honte est un jugement, car si nous voulons cacher quelque chose sur nous c’est que nous ne la considérons pas comme digne d’être exposée en pleine lumière.
Le jugement de ceux qui nous entourent dans ce cas là, lorsqu’il n’entraine pas notre propre jugement, est une bonne chose. Car cela nous permet de constater comment d’autres voient un aspect de notre personne. Bien sûr que tous les jugements ne sont pas classés de manière égale et horizontale. Les jugements peuvent être pertinents ou pas du tout pertinents. Les jugements sont verticalement classés. Dire que quelqu’un est beau ou laid n’a pas la même pertinence que d’expliquer à quelqu’un pourquoi il a commis une erreur que ce soit professionnellement, en tant qu’ami ou père de famille.
Donc, les jugements peuvent être des bonnes choses.
Ne craignons pas le jugement des autres, ne craignons pas non plus notre propre jugement.
Merci de votre attention, à la prochaine fois et prenez soin de vous.
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